La CSDM ferme des classes spécialisées pour enfants ayant de graves difficultés d’apprentissage


Six classes spécialisées pour des élèves ayant les plus grandes difficultés doivent fermer leurs portes à la fin de l’année scolaire. Ces 90 enfants, qui ont un retard d’au moins deux ans sur le programme, seront intégrés dans des classes ordinaires de la Commission scolaire de Montréal (CSDM).

Selon ce qu’a appris Le Devoir, la plus grande commission scolaire du Québec estime que ces élèves ayant des « difficultés graves d’apprentissage » (DGA) seront mieux servis dans des écoles ordinaires — avec le soutien d’orthopédagogues — que dans des classes spécialisées.

Le syndicat des enseignants de la CSDM dénonce cette décision qui viendra alourdir la tâche des professeurs dans les classes ordinaires. L’explosion du nombre d’élèves en difficulté dans les classes ordinaires nuit à la fois aux élèves et aux enseignants, estime le syndicat.

Ces six classes DGA (cinq au primaire et une au secondaire) sont abolies parce que la demande baisse pour ce type de service spécialisé, explique au Devoir Catherine Harel Bourdon, présidente de la CSDM. À l’inverse, la demande augmente pour des services aux élèves ayant un trouble de langage ou d’autisme. La commission scolaire prévoit ainsi de créer 19 classes spécialisées pour répondre aux besoins de ces élèves handicapés.

Les élèves sont envoyés dans des classes spécialisées par un comité formé des parents de l’enfant, de membres du personnel de l’école et d’un conseiller pédagogique en adaptation scolaire. Et ces comités ont tendance à recommander l’intégration en classe ordinaire des élèves ayant de graves difficultés, indique Mme Harel Bourdon.

« L’inclusion, dans certains cas, ça fonctionne super bien. On constate que les équipes-écoles travaillent beaucoup mieux dans le soutien de ces enfants-là en classe ordinaire avec des orthopédagogues en classe. C’est au-delà de nos espérances », dit la présidente de la CSDM.

Comme l’a rapporté jeudi Le Devoir, le modèle québécois d’inclusion fait l’envie de pays comme la France, qui cherchent à favoriser la scolarisation des enfants handicapés dans les écoles ordinaires. « Vous me faites rêver, là ! » a déclaré la secrétaire d’État française chargée des Personnes handicapées, Sophie Cluzel, en visitant une école du quartier Centre-Sud de Montréal.

 Les professeurs crient déjà à l’aide. Ils sont épuisés. Quand on leur demande pourquoi, la première raison qu’ils nous donnent, c’est l’intégration d’élèves en difficulté dans les classes ordinaires sans les services de soutien.

« L’intégration à tout prix »

En fermant ces classes pour élèves en grandes difficultés, la CSDM pratique « l’intégration à tout prix », sans tenir compte des besoins des enfants, déplore l’Alliance des professeures et des professeurs de Montréal.

Ça coûte cher, une classe DGA, car il y a moins d’élèves que dans une classe ordinaire, rappelle Catherine Renaud, présidente de l’Alliance. « On a l’impression que la fermeture de ces classes est d’abord une mesure administrative et budgétaire et que l’élève doit s’adapter. Ça devrait être l’inverse, le système scolaire doit s’adapter aux besoins de l’élève », dit-elle.

La représentante des enseignants est convaincue que la demande reste forte pour les classes spécialisées. Les enfants qui fréquentent une classe DGA ont au moins deux ans de retard sur le programme du ministère. L’intégration de ces 90 élèves provenant de six classes spécialisées viendra alourdir le climat dans les classes ordinaires, fait valoir le syndicat.

« Les professeurs crient déjà à l’aide. Ils sont épuisés. Quand on leur demande pourquoi, la première raison qu’ils nous donnent c’est l’intégration d’élèves en difficulté dans les classes ordinaires sans les services de soutien », dit Catherine Renaud.

Jusqu’à la moitié des élèves des classes ordinaires ont des difficultés d’apprentissage, rappelle-t-elle. Les enseignants de ces classes sont débordés. Ils n’ont le temps de s’occuper ni des élèves ayant des besoins particuliers ni des élèves plus doués.

Les enseignants ont pourtant obtenu du renfort avec les réinvestissements du gouvernement en éducation, souligne Catherine Harel Bourdon. La CSDM a reçu des fonds pour embaucher 70 techniciens en éducation spécialisée, 11 orthophonistes, 7 préposés aux élèves handicapés et 6 ergothérapeutes. Deux postes et demi de techniciens en travail social et un poste et demi de conseiller pédagogique ont aussi été créés.

Nouvelles classes spécialisées

« Contrairement à ce que dit le syndicat, on n’est vraiment pas dans une dynamique de fermeture de classes », dit la présidente de la CSDM. L’ouverture prévue de 19 nouvelles classes spécialisées l’an prochain — pour les élèves ayant des difficultés de langage ou un trouble du spectre de l’autisme — confirme l’engagement de la commission scolaire.

Malgré la fermeture de six classes pour les élèves ayant de graves difficultés d’apprentissage, il restera 40 de ces classes spécialisées à la CSDM — 32 au primaire et 8 au secondaire.

Les classes DGA qui seront abolies sont offertes dans le Centre-Sud (école primaire Jean-Baptiste-Meilleur), dans Rosemont-La Petite-Patrie (deux classes à l’école primaire La Petite Patrie), dans Hochelaga (école primaire Sainte-Jeanne-d’Arc), dans le Sud-Ouest (école primaire Victor-Rousselot) et dans le Plateau-Mont-Royal (école secondaire Jeanne-Mance).

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